Les échecs n'ont pas échappé
aux excès de la Révolution Française.
Ainsi, en 1793, le citoyen
Guyton-Morveaux
s'interrogeait :
"Sera -t-il permis à des Français de jouer à
l'avenir aux échecs ? Cette question fut agitée,
il y a quelques jours, dans une société de bons
républicains, et il fut conclu, comme on devait s'y attendre,
par la négative absolu."
"Mais on demanda ensuite s'il ne serait pas possible de républicaniser
ce jeu, le seul qui exerce véritablement l'esprit..."
"Tout le monde sait que le jeu d'échecs est une image
de la guerre ; jusque là rien qui répugne à
un républicain..."
"Ce sera le jeu des camps, ou si l'on aime mieux de la petite
guerre. Le mot échecs a une étymologie royale
; c'en est assez pour le condamner à l'oubli..."
"Le personnage principal sera le porte drapeau, ou pour mieux
dire, le drapeau. Il ne sera pas difficile de donner à
la pièce une forme convenable à cet attribut ;
elle tiendra la place du ci-devant roi [...] ; lorsqu'on l'attaquera,
on en avertira par ces mots : au drapeau ; lorsqu'elle sera
forcée, on criera victoire ; lorsqu'elle sera seulement
enfermée, on dira blocus..."
"La pièce appelée si bêtement reine ou
dame sera l'officier général, pour abréger,
l'adjudant. Les tours seront les canons, et l'on ne cherchera
plus le rapport de leur mobilité avec leur dénomination.
Roquer sera mettre un canon près du drapeau ; on l'annoncera
en disant : batterie au drapeau. Les fous représenteront
la cavalerie légère, les dragons. Les ci-devant
chevaliers étaient déjà descendus au rang
de cavaliers. Les pions formeront l'infanterie [...] quand ils
auront enfoncé le camp ennemi jusqu'à sa limite
[...] leur nouvelle marche ne sera plus que l'image naturelle
de l'élévation en grade d'un brave soldat."
Extrait du Moniteur du 20 brumaire an 2 (10 novembre 1793)
Feu Monsieur le baron Louis Bernard Guyton de Morveau
(1736-1816), conventionnel et membre du comité de Salut
Public, fut à l'initiative d'une autre réforme radicale
: celle de la nomenclature chimique.
in Bulletin de l'Amateur, n° 1, 1996
avec l'aimable autorisation des anciens Directeurs de la Publication
:
Bernard Guérin et Dany
Senechaud