Et oui ! ce génial stratège qu'était
Napoléon était un piètre joueur d'échecs.
Après son passage à l'école royale d'artillerie
de la Fère, il devient officier.
Le lieutenant Bonaparte jouait souvent au café de la Régence
à Paris. Ses débuts étaient mauvais; si son
adversaire calculait trop longtemps, il se pinçait les lèvres,
frappait du pied et battait du tambour avec impatience sur le rebord
de l'échiquier, ce qui ne laissait pas que de faire danser
les pièces et de troubler le jeu. S'il perdait, c'était
bien pis encore; il donnait quelque fois de grands coups de poing
sur la table et faisait tout sauter. Cependant, lorsque l'action
était une fois bien engagée, quand la mélée
devenait vive, il avait souvent des coups très brillants.
Son ancien camarade Bourrienne le dépeint pendant la campagne
d'Italie:
"Bonaparte jouait aussi aux échecs,
mais très rarement, et cela parce qu'il n'était que
de troisième force et qu'il n'aimait point à être
battu à ce jeu qui passe on ne sait trop pourquoi pour une
prétendue imitation du grand jeu de la guerre. a celui là
Bonaparte ne craignait personne.
Cela me rappelle qu'en partant de Passeriano, il déclare
que nous passerions par Mantoue. On lui dit que le général
commandant la place qui était, je crois le général
Beauvoir, était un des plus forts joueurs d'échecs.
Bonaparte désira faire sa partie. Le général
Beauvoir lui demanda de désigner le pion qui ferait mat,
en déclarant que si ce dernier était pris, il gagnait
la partie.
Bonaparte désigna le dernier pion à gauche de son
adversaire, on y mit une petite marque et ce fut ce pion qui fit
le mat. Bonaparte n'était rien moins que content. Il aimait
bien jouer avec moi parce que, bien qu'un peu plus fort que lui,
je n'étais pas assez fort pour le gagner toujours. Dès
qu'une partie était à lui, il cessait le jeu pour
rester sur ses lauriers."
En Égypte, Bonaparte jouait aux échecs avec M. Poussielgue,
ordonnateur de l'armée d'Orient et avec M. Amédé
Jaubert. Poussielgue le battait quelquefois. Il jouait souvent à
la Malmaison : mémoire de Mme de Rémusat soirée
du 20 mars 1804 avant l'exécution du duc d'Enghein à
Vincennes :
Bonaparte l'invita à jouer après le dîner (avant
il lui avait simplement demandé de la conseiller au cours
d'une partie qu'il faisait avec l'un de ses hôtes) mais, dit
elle, le jeu du premier consul était fort médiocre.
De plus il ne voulait pas se soumettre à la marche normale
des pièces. Mme de Rémusat le laissa faire "ce
qui lui plaisait". Au cours de la partie, il prononça
à mi-voix "Soyons amis Cinna", puis les vers de
Guzman dans "Alzire" de Voltaire : "Et le mien, quand
ton bras vient de m'assassiner, m'ordonne de te plaindre et de te
pardonner" "Nous jouions encore quand le bruit d'une voiture
se fit entendre : on annonça le général Hullin."
Juillet 1809 après Wagram à Schoenbrunn : Mémoires
de Constant.
"M. Maezel avait aussi fabriqué un automate connu dans
toute l'Europe sous le nom de "Joueur d'échecs".
L'automate était assis devant une table sur laquelle le jeu
d'échecs était disposé. Sa majesté prend
une chaise et s'assied en face de l'automate et dit en riant: "Allons
! mon camarade; à nous deux."
L'automate salue et fait signe de la main à l'empereur comme
pour lui dire de commencer. La partie engagée, l'empereur
fait deux ou trois coups et pose exprès une pièce
à faux. L'automate salue, prend la pièce et la remet
à sa place. Sa majesté triche une seconde fois; l'automate
salue encore, mais il confisque la pièce. "C'est juste"
dit sa majesté et pour la troisième elle triche. Alors
l'automate secoue la tête et passant la main sur l'échiquier,
il renverse tout le jeu. L'empereur fit de grands compliments au
mécanicien...
Pendant la campagne de Pologne, il reçoit l'ambassadeur de
Perse alors qu'il joue aux échecs avec Berthier. Il joue
avec Murat, Bourrienne, Berthier et le duc de Bassano pendant la
campagne de Moscou; selon le duc de Bassano, il débutait
mal, mais au milieu de partie, il voyait au delà de 3 ou
4 coups.
Il joue aux échecs sur le Northumberland qui s'amène
à Saint Hélène et là, il fait sa partie
tout les jours. Mme de Montholon raconte: "Quelquefois il établissait
"pièce touchée, pièce jouée",
mais c'était seulement pour son adversaire, pour lui c'était
différent et il avait toujours une bonne raison pour que
cela ne comptât et si on lui faisait l'observation, il riait."
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